Message du 10/07/2013

Se réveiller à 5h38 du matin avec la boule au ventre en se demandant pourquoi? oui pourquoi... parce que...

Ca fait un an aujourd'hui.... 1 an déjà... c'est tellement long et c'est tellement passé vite. il s'en est pasé des choses en 1 an.

1 an aujourd'hui qu'à 7h du matin mon téléphone portable a sonné et que mon coeur n'a fait qu'un tour, je savais que ça n'était pas bon.

1 an que mon père au bout du fil m'annonçait que maman allait mourir d'une minute à l'autre, que je courais dans la salle de bain où mon chéri se douchait pour aller à son travail le matin (on avait prévu de partir à Nevers l'après midi parce qu'on savait que de toute façon ça ne durerait pas encore longtemps), que je lui dis "maman est en train de mourir", qu'il n'entend pas à cause de l'eau qui coule et que je hurle en pleurant "maman est en train de mourir".

1 an qu'il a bondit hors de la douche m'a dit "je file à mon boulot dire que je peux pas rester, je reviens et on part", de toute façon on était à 5h de route alors 1h de plus ou de moins n'allait pas changer grand chose. Je commence à préparer les valises en urgences

1 an qu'il revient environ 5 minutes après le 2ème coup de fil vers 8h30 de mon père qui dit "ça y est, c'est fini", que je m'effondre dans les bras de mon chéri, qu'on pleure un peu tous les 2, et puis finir les valises en urgence mais plus trop, finalement c'était plus la peine de se presser.

1 an que les 1ers textos arrivent.

1 an sans elle, ça a été long, encore aujourd'hui je ne peux pas regarder des photos d'elle, notamment avec ses petits fils qu'elle adorait tant sans me mettre à pleurer, je ne peux plus lire l'histoire de petite ours brun chez sa mamie. Loulou a encore quelques souvenirs mais pour combien de temps?

1 an que ma vie a basculé et que de "pas très bien", je suis passée à "vie insupportable au quotidien", que les douleurs et la faitgue ont explosé et que la maladie s'est bel et bien installée. Que des espoirs de pouvoir encore récupérer une vie "normale" se sont effondrés, que je ne fais plus de projets d'avenir professionnels et familiaux.

1 an que j'ai l'impression de m'enfoncer doucement dans des sables mouvants où plus je me débats et plus je m'enfonce, que j'ai le sentiment de hurler "à l'aide" et que mes cris se perdent dans le silence.

1 an que je me dis que je vais bien finir par le faire ce deuil, que je ne suis pas la 1ère ni la dernière à vivre sans ma mère et que d'autres ont connu la leur encore bien moins longtemps que j'ai eu la chance de connaitre la mienne. Mais au fond peut-être que j'ai ce sentiment de quelque chose d'incompli parce qu'au final ma mère était devenue véritablement ma mère depuis peu de temps. Parce qu'elle avait compris ma maladie (alors même que tous les diagnostics n'étaient pas encore posés) et qu'elle a été une des 1ère à véritablement me soutenir et me comprendre. Et qu'à ce moment elle est devenue ma mère, celle à qui je pouvais me confier, parler, exprimer ce que je ressentais sans être jugée, sans qu'on veuille me changer. (je ne débattrait pas ici et aujourd'hui du statut de la personne malade dans ma famille, où seules existent les personnes malades et que peut-être le jour où on m'a diagnostiqué ma maladie de Biermer, j'ai acquis ce droit d'exister parce que j'étais moi même malade).

1 an que tout s'est arrêté. Je savais que ça ne continuerait pas longtemps, je savais que même si à l'extérieur elle donnait l'impression d'être encore vivante, à l'intérieur, son corps se décomposait. J'ai profité autant que j'ai pu des derniers mois passés avec elle, j'ai fait en sorte qu'elle profite au maximum de ses derniers mois avec son petit fils. Si j'appelais tous les jours c'était pour ça, pour qu'elle ait l'impression de partager notre quotidien, son quotidien à lui.

1 an que tout s'est écroulé, toute ma famille. Maman avait fait en sorte d'être un pilier essentiel, parce qu'elle avait besoin de se sentir exister et lorsque qu'elle est morte, tout s'est effondré. j'ai perdu des personnes qui m'étaient extrèmement chères et qui faisaient partie intégrante de ma famille de coeur (pas seulement de ma famille famille), et la solitude s'est installée. Des gens qui ne se sont jamais vraiment préoccupés de nous, d'un coup font mine de vouloir faire partie de note vie, on se retrouve à devoir gérer un père narcissique dont on s'aperçoit à quel point ma mère a voulu nous en protéger, qu'il veut aujourd'hui se raccrocher à nous comme à des bouées car il est seul mais qu'au fond il n'a jamais fait partie de nos vies. Comment faire ça? Il faudrait que d'un coup je me mette à filer le parfait amour avec un père qui m'a ignorée et détruite toute ma vie et qui même encore aujourd'hui ne pense qu'à son bien être à lui? Je n'y arrive pas moi. On doit faire tout ça, et toutes seules (avec ma soeur) car au fond les gens veulent bien fair semblant d'être là, mais nous soutenir vraiment et s'attaquer aux vrais problèmes ça c'est autre chose. Certaines personnes se sont révélées être un vrai soutien aussi, je savais qu'elles étaient un peu ma 2ème famille et là j'en ai eu la certitude, mais tellement peu... Toutes les autres ont fuit, appellent, demandent si on va bien mais sans vouloir écouter la réponse, comme la plupart des gens. Quand elle est partie, c'est tout un pan de ma vie qui est parti avec elle.

Alors oui la vie continue, cette année a été extrèmement difficile pour moi (et pour mon entourage aussi), il n'y a pas eu de véritable avancée quand à moi, ma santé, mon avenir. Oui je me raccroche à ce que j'ai de plus précieux : mon fils, mon mari, ma soeur, le crochet (qui sont clairement les choses qui me tiennent en vie aujourd'hui).

Dans 2 mois, loulou fera sa 1ère rentrée scolaire, elle ne sera pas là... et bien sûr je penserai à elle qui aurait tellement voulu voir ses petits enfants rentrer à l'école.

Et je vais continuer à vivre pour moi, tenter d'avancer pour moi, essayer d'aller mieux, continuer à me battre, essayer de comprendre comment le faire.

Mais s'il y a une chose dont je suis sûre aujourd'hui, c'est que la vie après la mort n'existe pas. Jusuque là je gardais un espoir secret que oui, les personnes qui meurent restent quelque part et veillent sur nous. Aujourd'hui je sais que c'est faux. Si toutefois leur âme ne s'est pas totalement étaiente avec leur corps, je suis sûre qu'elles n'ont aucun pouvoir d'action sur notre monde et nos vies, parce que je sais que sinon ma mère aurait fait tout ce qu'elle aurait pu pour nous aider. Il faut se rendre à l'évidence, la mort c'est juste la mort. On va tous y passer un jour ou l'autre et tout ce qu'on peut faire c'est ici et maintenant. Dire à nos proches qu'on les aime, c'est ici et maintenant, profiter de ce que la vie peut nous apporter de bon c'est ici et maintenant, après il sera trop tard.

C'est ce que j'essaie de mettre en place au quotidien, (même si en ce moment c'est pas flagrant) ça reste mon objectif premier. Ce que j'ai envie de vous dire aujourd'hui c'est ça, rester auprès de ceux que vous aimez, voyez les autant que possible, soyez là pour eux aujourd'hui car vous ne savez jamais ce que demain vous apportera (à vous ou à eux). D'un seul coup, tout peut basculer. Alors n'ayez aucun regret, faites en sorte de ne pas vous morfondre une fois ces personnes disparues car vous auriez du faire ou dire ça ou ça. j'ai au moins ça pour moi, ça fait 1 an que je n'ai pas de regret et que j'ai le sentiment d'avoir fait tout ce que j'ai pu avec et pour elle, pour qu'elle sente que j'étais là et que je l'aimais. Et je suis sûre qu'elle est partie en le sachant.

Certains ne comprennent pas pourquoi j'ai besoin de "raconter ma vie à tout le monde", que tout ça devrait rester enfoui en moi car c'est mon intimité, j'ai juste envie de répondre que non j'ai besoin que ça sorte, j'ai besoin de l'écrire, pour ne pas oublier, pour garder une trace, et peut-être aussi pour partager avec ceux qui le veulent.

1 an

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